Peintres israéliens - la peinture de portraits en Israël
L’art israélien puise ses sources dans l’art mondial. Des artistes émigrés d’Europe en ont jeté les premiers jalons. Des artistes qui ont apporté avec eux d’anciennes traditions des pays où l’art et la culture étaient solidement établis. En particulier, l’art du portrait. Un des aspects les plus intéressants du portrait chez les artistes d’origine européenne est ce qui apparait comme une dichotomie entre les portraits de juifs européens et ceux d’israéliens, juifs et arabes. Herman Struck était de ceux-là, lui qui a peint entre autres le portrait de Theodore Herzl. Ce portrait a été créé a l’époque où l’artiste vivait à Berlin. C‘est un portrait à ¾ d’angle, au format officiel prototype impressionnant. Même si l’on ignore qui est Herzl, on contemple le portrait d’un homme qui porte bien, élégant, cheveux et barbe nets et bien coiffés, regardant l’horizon, au sérieux irradiant. Le style du vêtement comme du format est européen classique.
Si l’on pense à un portrait dans un sens plus large, celui d’une idée, l’essence d’une génération peut être exprimée dans un seul portrait. C’est ce que dépeint Herman Struck dans une autre toile. Cette gravure représente un artisan assis, oisif, sur les marches de son échoppe. C’est en réalité la description d’un juif en exil, son métier est probablement la fabrication de récipients en cuivre, une profession commune parmi les juifs de la diaspora. L’échoppe derrière lui est sombre et lui-même est courbé, le regard figé ; la surbrillance de ses mains et leur mise en relief, jointes l’une sur l’autre, dans une sorte de geste d’abandon, un signe de marasme et d’inemploi. C’est le portrait du juif exilé, misérable, sans emploi et sans joie de vivre, courbé dans le corps et dans son esprit, portant derrière lui une grande tâche noire qui le lie symboliquement aux persécutions des juifs à travers l’histoire ; les pogroms, le rejet social et économique, le préjugé de classe et moral que les juifs ont subi à travers les générations de l’exil. A l’opposé du titre de l’œuvre qui fait allusion aux glorieuses racines du peuple élu, rayonnant dans sa foi et son accomplissement, nous contemplons le portrait d’un homme défait, seul et privé de tout droit, de gloire ou d’estime de soi.
Le portrait israélien dans l’esprit du renouveau
On peut dire que le portrait israélien des premiers temps de la reviviscence présente des innovations par rapport au portrait traditionnel européen et / ou portrait d’exil. Car le pionnier avait la vocation d’un homme nouveau dans un pays nouveau, distinct en tout du juif exilé, étranger et persécuté. En Israël, les juifs voulaient se sentir chez eux, s’intégrer au pays et ressembler à ses habitants en s’adaptant au climat, au comportement et à l’habillement des locaux ; à leur notion d’indépendance et de sécurité aussi. Le pionnier incarne par-dessus tout la réalisation de toutes ces aspirations.
Ce jeune berger est un pionnier en Israël. Sa chevelure gonflée est un signe distinctif son visage est jeune, lumineux et sa tête droite ; son regard est ferme et sûr de lui, comme pour marquer qu’il est maitre chez lui. Les valeurs qui présidaient à leur vie prenaient le contrepied de celles des juifs en exil. Le portrait de ce juif israélien est fort et plein de vie, son regard déterminé et vigoureux. L’œuvre d’Avni atteste d’une main confiante qui laisse le champ libre à une profusion de peintures, des coups de brosse rugueux et orageux et mélange de couleurs tout en mouvement sur la toile. Le portrait aussi s’inscrit dans une ligne conceptuelle. Le visage est quasiment absorbé par le fond, comme pour affirmer que le berger fait corps avec son pays, que le travailleur possède sa terre et qu’elle lui appartient. L’assimilation est l’idée centrale ici ; le jeune garçon juif n'est plus un étranger, détaché de son environnement mais taillé dans son paysage et intégré dans l’harmonie nationale. Les couleurs de la terre et du paysage sont ses propres couleurs. Sur la droite du portrait, on ne distingue pas facilement où se termine le portrait et où commence le paysage d’arrière-plan. Comme mentionné, il faut noter qu’il n’y a pas de coïncidences dans le tableau. L’artiste exprime ainsi l’unité entre le berger et le paysage.
Lorsque des artistes juifs commencèrent à venir en Israël et à se documenter, un nouveau thème se développa dans leur travail : le type local. Ce portrait est basé sur une photographie prise par l’artiste Ephraim Moshe Lillian en Israël. Le portrait dépeint un homme, apparemment yéménite ; l’artiste accentue l’ethnicité dans les traits de son visage, sa chevelure et son couvre-chef. Bien des artistes arrivés en Israël à la fin du XIXe siècle, début XXe, se trouvaient en présence de types orientaux pour la première fois de leur vie et étaient fascinés par la différence, dans leur apparence, des juifs qu’ils connaissaient dans leurs pays d’origine. De tels portraits étaient perçus comme typiques des paysages arides d’Israël. Il y avait aussi une perception exotique bien sûr et une approche ‘colonialiste’ de l’étranger oriental, à la peau tannée. Le portrait dépeint une personne radicalement opposée au portrait de Herzl par exemple, « fossilisé » dans son costume et dans sa prestance. Le portrait du jeune yéménite le montre en extérieur à en juger par le mouvement de ses boucles de cheveux flottant au vent et non apprêtés comme le portrait de Herzl. Son visage est contracté à cause du rayonnement intense du soleil israélien et sa bouche ouverte comme par distraction. Le contraire absolu de la figure pleine de dignité de Herzl. Les deux portraits sont des gravures mais totalement distinctes dans leurs lignes. Herzl est dessiné en traits minutieux, le visage du yéménite semble dessiné au fusain, les traits sont lâchés et tâchés. Le regard de ce dernier est étréci, dissimulé dans l’ombre et n’offre pas la profondeur de réflexions qui émane de Herzl.
Reuven Rubin est l’un des premiers artistes juifs en Israël. Il a peint un très intéressant autoportrait, différent du juif en exil mais différent aussi du portrait ethnique local. Une interprétation prétend que cet autoportrait parle à Jésus, figure de l’ascétisme, du torturé, comme pointant le doigt pour faire porter le blâme aux chrétiens persécuteurs des juifs à travers l’histoire. Pour moi, on peut déceler dans ce portrait les nombreux changements survenus à un juif mué en Israélien : l’abandon des conventions européennes pour la tenue et la coiffure est immédiatement apparent. La personne sur le portrait a effectivement des traits ascétiques qui ne sont pas typiques d’un portrait officiel européen qui généralement brosse une tenue vestimentaire soignée et méticuleuse. Le vêtement léger et souple est davantage à l’unisson avec le climat israélien comme aussi avec l’aisance coutumière de la société israélienne – le contraire du code formaliste, sans cravate, pas repassé, le dos vouté.
L’ascétisme par-delà la correspondance avec Jésus concorde bien davantage avec le mode de vie en Israël dans les années 1920, quand les pionniers, les travailleurs et les rêveurs laissèrent tout leur passé derrière eux dans leurs pays d’origine pour réaliser leur vision de l’Etat juif. Les difficultés sont bien connues, y compris dans la vie quotidienne, les maladies et la survie face à l’hostilité des voisins. Il y avait peu de place pour le prestige dans le cadre de cette réalité et le portrait excelle à l’illustrer, y-compris dans ses couleurs vagues, une palette limitée par souci d’économie et par force ou par choix délibéré pour faire ressortir cette réalité, quasiment monochromatique, grise-jaunâtre. Il faut noter que cet autoportrait est unique en son genre. Dans ce portrait, plus que dans aucun autre, chaque détail a une signification. L’artiste choisit la manière de se représenter et ce qu’il veut dissimuler. L’expression du visage est volontaire et dans le tableau de Rubin, nous observons un regard dirigé directement vers le regardant, un regard plein de tristesse et de fatigue reflété par un visage osseux et jaunâtre. La tête penchée conduit le regard vers les paumes qui sont le deuxième foyer d’intérêt du tableau. Elles sont très larges et se meuvent dans la direction du regardant. L’artiste est précis dans la position des doigts comme pour dire quelque chose de spécial. Il est possible que la combinaison entre le regard morose et les gestes des mains ait créé l’association avec Jésus, dans le contexte d’une apparence générale ascétique et dolente.
Dans les années 1950, le portrait israélien retourne aux sources, dans le sens du portrait européen, cravaté, le regard contemplant l’horizon. Le lieu et la modernité de l’époque à la fois autorisent une telle liberté dans la description du portrait. La main est légère sur la brosse, les couleurs déposées librement, comme ondoyantes. On peut voir par exemple sur les stries des cheveux la couleur séchée, s’évanouissant vers la fin de la ligne ondulée, indisciplinée, sur les bords des boucles du personnage. Le col du vêtement est incorporé gracieusement et de manière tranchée tout à la fois avec le fond du tableau dans une transition ingénieuse entre l’expression réaliste d’un portrait et la réalisation d’une œuvre d’art à part entière. Les couleurs sont quasiment sèches au moment même où elles sont appliquées mais il y a quelque chose d’exalté et bouillonnant de vie dans ce type de travail, un sentiment de liberté de l’artiste qui correspond bien à la personnalité de Katz, le sujet du portrait. Puissance d’un homme qui a créé de toutes pièces un monde culturel dans la jeune cité émergente de Tel Aviv. A mes yeux, la primauté et le dynamisme de l’œuvre de Katz se voient incarnés dans la manière dont le portrait est peint. La crinière de cheveux non plus n’est pas accidentelle, elle évoque la mèche ébouriffée du pionnier venu construire un nouveau monde, ce que à sa manière fait également Katz, pionnier, novateur hardi venu lui aussi créer un monde, un monde d’art dans le pays du désert. Son regard est rempli de puissance et de passion pour la vision qu’il imagine.
En conclusion, l’art du portrait israélien a connu plusieurs incarnations depuis sa naissance européennes jusqu’à sa jonction avec les contenus et la forme de l’esprit israéliens. Avec le retour du peuple juif dans son pays, les artistes se sont libérés des prescriptions culturelles de leurs pays d’origine comme aussi des engagements à l’ordre du jour dans l’idéologie sioniste. Avec le temps, on observe de plus en plus de latitude dans la portraiture de l’individu, dans la pénétration de l’âme du sujet peint, dans des portraits toujours plus personnels, sondeurs de la vie et du cœur, libérés des normes et des modèles.
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